Order-from-noise

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Et poutant ça tient ...

 

Chacun fait ce qu’il veut…

 

Comment peut-on imaginer que ceux qui se sont jetés au cœur de ce trafic puissent sortir vainqueurs et satisfaire l’infinie variété des objectifs qui sont les leurs.

Certains se rendent à leur domicile, d'autres en sortent. Une large majorité rejoint leur travail. Des amis se déplacent ensemble à la rencontre d’autres amis qui ont choisi de faire le chemin séparément. Certains vont au supermarché et croiseront ceux qui ont pu s'en extraire. D'autres encore, habitués aux transports en commun, auront justement décidé aujourd'hui de prendre leur vélos, scooters, d'emprunter la voiture d’un ami afin de se rendre au garage le plus proche pour récupérer la leur. Las du trafic, une minorité aura pris le bus et en descendra au premier arrêt venu pour rejoindre la gare la plus proche. Il ne s'agit pas d'une foule dont la conduite est ordonnée de l'extérieur mais plutôt d'un groupe d'individus dont les objectifs pourtant différents les ont conduits à s'assembler de manière bien involontaire sur une portion étroite de la chaussée. Ils ne se préoccupent pas d'ailleurs d'en occuper rationnellement l'espace. Plus partiaux qu'égoïstes, ils cherchent, dans un même élan, à maximiser leur progression et à rendre compatible la poursuite de leur intérêt avec les contraintes que la présence des autres leur oppose. Les objectifs qu'ils poursuivent sont donc multiples et les moyens mis en œuvre pour en satisfaire la réalisation le sont tout autant. Et pourtant, alors que personne ne dicte à quiconque la meilleure façon de régler sa conduite sur celle des autres, ils réussiront tous à en combiner l'infinie variété et à satisfaire leurs attentes.

 

Et pourtant ça marche !

 

Les véhicules se croisent, s’entrecroisent, se défient, zigzaguent, freinent ou forcent le passage mais le trafic ne se fige pas et les véhicules poursuivent de s'accorder les uns avec les autres. La congestion totale du trafic devrait être la règle alors qu’elle est l’exception. Si chacun signale sa présence à l’autre bruyamment et de manière ostentatoire ou au contraire de manière feinte, personne en revanche ne dicte à quiconque ce qu’il faut faire ou n’est là pour dire à l’ensemble où et quand avancer où et quand céder le passage. Chacun décide dans l’instant, tablant de proche en proche sur ce que l’autre fera. Sans régulation centrale, abandonnée à une myriade de décisions individuelles, la circulation forme un flux suffisamment efficace pour donner une solution de passage à ceux qui s'y ruent. A l'exception de quelques soubresauts, le trafic perdure et acquiert même une fluidité étonnante. Localement, l'écoulement du trafic répète inlassablement certaines configurations reconnaissables dont certains tirent avantage pour accélérer leur progression. Globalement, même si les contours irréguliers du trafic évoluent, le trafic est contenu dans l'espace et l'entrelacs des véhicules conserve son identité en dépit de son incessant renouvellement. Il se construit et s’établit par ajustements successifs. Il se replie souvent ou s’exagère parfois mais jamais il ne se congestionne totalement alors que ceux qui en règlent la dynamique ne se connaissent pas, ne se parlent et affichent même pour l’autre toutes les apparences de la plus parfaite indifférence. Aucunes réunions préalables ne les ont rassemblées pour définir les modalités de leur collaboration future, aucunes tribunes ne les ont réunies pour se concerter et délibérer sur la meilleure façon de progresser ensemble, aucuns débats pour s'entendre sur le bien fondé de leurs attentes. Ils restent indifférents les uns aux autres, font ce qu'ils veulent et pourtant ... et pourtant ça marche.

 

Sans plan ni programme

 

Disposer en pareille circonstance d’une information sur l’évolution du trafic est une idée qui ne manque pas d’attrait. Ceux qui en disposent en espèrent un avantage pour anticiper le comportement de ceux avec lesquels ils se coordonneront. Un formidable marché répond à cette demande. Celui des panneaux d’information, de la météo routière auquel viennent s'associer, tour à tour, Bison Futé, le flash info, le GPS et les réseaux sociaux. Cet arsenal informationnel se propose donc de donner une représentation spatiale complète des coordinations actuelles ou futures. Maintenant, la portée de cet avantage reste limitée. Si vous vous joignez au trafic, vous ajoutez une composante avec laquelle les autres devront composer par le simple fait que ce que vous déciderez de faire influencera en retour ce que les autres feront et vice et versa. La façon dont vous conduisez dépend de celle dont les autres conduisent. Votre vitesse dépend de l’arrêt d’autres véhicules, votre arrêt implique que d’autres aient pris votre créneau. Nous réagissons à un environnement composé de réactions d’autres gens. Le premier problème à résoudre pour un automobiliste est qu’il est un élément du problème. Comment pourrait-il, en surplomb d’un flux dominé par la complexité d’une myriade de réactions réciproques parfaitement imprévisibles tenir avec succès une décision indépendante de la décision des autres. Personne ne saurait par ailleurs calculer toutes les anticipations des personnes avec qui chacun se rapporte. 

Disposer ou non de cet avantage sur le trafic ne fera au final aucune différence. Les automobilistes se bornent à sélectionner les pratiques qui réussissent et délaissent très vite les promesses prises aux sources de l’info routière. Les informations les plus utiles qui supportent le plus efficacement la progression des automobilistes ne proviennent d'aucunes instances centrales et expertes qui en agrègeraient la complexité. Bien au contraire, la connaissance dont nous faisons usage dans ces situations n'est pas complète et centralisée en un lieu unique mais plutôt partielle et dispersée dans le réseau de relations du flux autoroutier. Autrement dit, c'est dans l’instant de la relation et de proche en proche que chacun tire de sa pratique, de son expérience et de son talent la meilleure façon de régler sa conduite sur celle des autres et cela sans plan, ni programme. On peut s’en étonner mais ces ajustements adaptent des automobilistes à des problèmes complexes dont personne ne dispose de vision complète ou ne sait à l’avance à quoi ressemble une décision qui marche.

 

Un problème de coordination

 

La façon dont les automobilistes se rapportent les uns aux autres forme une solution à un problème de coordination. Or, il n’y a aucune certitude que la solution à laquelle parviennent quotidiennement les automobilistes soit systématiquement la bonne ou la plus efficace pour satisfaire leurs attentes. Dans l’incertitude du trafic, la réalisation des objectifs de chacun se trouvera nécessairement limitée par un environnement composé lui-même de gens résolus à réaliser les leurs. Certains résultats seront heureux d'autres désastreux. Mes amis m'auront attendu longtemps, le supermarché aura fermé ses portes sans attendre ceux qui se proposaient de s'y rendre. La façon dont chacun se rapporte les uns aux autres peut donc contribuer à me placer dans une situation qui ne me sera pas nécessairement favorable. Le profit que chacun tire des échanges auxquels il s'est bien involontairement prêté peut ne pas correspondre aux efforts déployés. Chacun aura-t-il été payé en contrepartie des efforts déployés ? Chacun a-t-il pu satisfaire son objectif de manière équilibrée entre le temps qu’il supposait investir et celui réellement investi, entre le prix anticipé du déplacement et celui dont il s’est réellement acquitté ? Est-il arrivé en avance au travail ou a-t-il vu son revenu baisser parce que son retard a été décompté de sa durée journalière de travail ? Le temps consacré à franchir le carrefour aurait-il pu être mieux investi ou encore être consacré à sa famille, dévolu à ses enfants, à une activité sportive ou à une activité rémunératrice ? Il n'y a pas dans cette affaire à attendre que les efforts produits soient payés en retour de réciprocité de la part de ceux avec qui s'établissent les échanges. Les décisions prises ne sont pas motivées pour rechercher un bénéfice mutuellement profitable. L'équilibre des échanges se fonde sur la rencontre de chacun partant de ses intérêts. Il n'y donc pas de justes compensations à escompter au terme des décisions car les échanges se nouent sur un principe de coïncidence et non de réciprocité. Un équilibre des échanges peut naître au même titre que plusieurs équilibres sont toujours possibles. Il n'y a pas dans cette affaire de contrat. Un équilibre se forme au sein d'un contrat parce que les termes qui fixent le devenir des interactions ont été établis pour harmoniser les décisions des contractants. Le contrat établit les concessions réciproques, la visée du contrat et les conditions de son exécution sont connues. Dans les situations qui nous préoccupent, il y a une énorme différence entre ce que les automobilistes pourraient consentir à accomplir ensemble, s'ils prenaient le temps d'en discuter, et ce qu’ils font réellement et obtiennent en retour. Il n'y a rien d'étonnant à cela car, en pareilles circonstances, aucunes concessions réciproques n'ont été préétablies aux fins d'un résultat conforme à la volonté de tous. L'effort dont chacun s'est acquitté ne fait l'objet d'aucune entente. Nous sommes dans l'immédiateté des échanges et personne ne décide de leurs équilibres. Chacun pourrait préférer perdre moins de temps, changer de place au sein de la file des voitures pour obtenir un équilibre des échanges très différent que d'autres pourraient souhaiter encore différent. Chacun partant de son intérêt, les décisions individuelles sont bien intentionnelles mais peuvent générer des effets collectifs non voulus. Peu importe, bien ou mal, le système réussit. Car les règles que les automobilistes pratiquent relèvent de ces interactions locales qui, se combinant les unes aux autres, parviennent à résoudre des problèmes que nous ne saurions mieux résoudre autrement. A bien y réfléchir, les résultats obtenus ne sont pas plus mauvais que ceux auxquels nous assistons lorsque chacun est censé savoir ce qu’il doit accomplir. Bien sûr, nous pourrions nous demander s’il existe d’autres façons d’organiser des personnes qui poursuivent leur intérêt ou s’ils existent de meilleurs systèmes pour combiner une multitude de décisions décentralisées hors de toute autorité centrale. 

 

Accroître ses chances d’être emmerdé

 

De nombreux dispositifs existent ainsi pour réguler le nombre de véhicules aux entrées du carrefour. Les feux tricolores cadencent avantageusement le flux amont délivrant, à intervalles réguliers, un droit d’accès aux uns et une interdiction aux autres. Des informations régulières, placées en amont de chaque voie, orientent le flux vers une voie de délestage destinée malheureusement à être rapidement saturée par un flux routier devenu subitement inhabituel. Certains dispositifs régulent le prix d'accès aux voies routières en fonction de périodes hautes ou basses de la journée jouant ainsi de manière efficace pour encourager ou dissuader les automobilistes de les emprunter. Afin d'harmoniser le flux routier, le regroupement de certains véhicules sont favorisés par l'existence de couloirs destinés aux vélos, aux bus, aux véhicules prioritaires. Parmi quelques innovations, certains péages offrent désormais un rabais aux véhicules dont le nombre de passagers est supérieur à 2 ou à 3. Plus avant, nous pourrions imaginer des dispositifs de péage dont le prix de passage serait tel qu’il sélectionnerait quelques happy few seuls capables d’échanger de l’argent contre du temps. Plus imaginatifs encore, d'autres moyens de régulation du trafic pourraient également être imaginés selon le type de conduite - sportive ou poussive -, la taille des passagers, leur sexe, la présence d'un filtre à particules, la propriété paire ou impaire de l'immatriculation. Quelque soit le bien fondé de ces dispositifs, ils garantissent à des personnes dispersées qui de surcroît ne communiquent pas entre eux de surmonter leurs divergences. Ces dispositifs sélectionnent des solutions qui les aident en quelque sorte à accomplir des choses qu’individuellement ils ne feraient pas mais dont la pratique produira des résultats qui apparaîtront collectivement avantageux. Maintenant, leur usage n'ira pas sans créer certains effets indésirables ? Tous retireront de ces expériences le sentiment d'une restriction, d'avoir été empêchés de rouler continûment, d'avoir perdu un temps considérable, d'avoir dû conjuguer, composer, renoncer. Par ailleurs, le prix des aménagements mis en place pour accorder les intérêts individuels avec une solution de nature collective sera toujours d'un montant sans commune mesure avec celui constaté lorsque les échanges sont laissés libres de s’établir sur la base de simples règles de composition. En outre, ces régulations externes au trafic, pourtant souhaitées, réclamées, voire plébiscitées, seront immédiatement dénoncées lorsqu’elles apporteront leur lot de nouvelles restrictions qui appelleront d'autres aménagements et bien d'autres encore dans une sorte de spirale infernale désormais auto-entretenue.

 

Se tromper avec la foule

 

Que la satisfaction des attentes que chacun retire de ses échanges soit bonne ou très mauvaise, elle sera de toute manière qualitativement très différente de la satisfaction globale ressentie collectivement. Prendre son véhicule et délaisser les transports en commun accroît inévitablement le nombre de véhicules. Doubler, freiner, faire une offre de passage ou la refuser, tarder pour se ranger aura un retentissement sur l’allongement du temps d’attente des véhicules avec lesquels chacun se rapporte. Dans l’ensemble, les automobilistes seront exposés plus longtemps à un stress et à une pollution dont les effets auraient pu être atténués si chacun s’était discipliné. Les automobilistes au final sont exposés à un système très déséquilibré où les pertes qu’ils subissent sont ignorées de ceux qui les infligent. Parce que certains tordent une règle, font défection à une offre, tardent à obtempérer, des accidents surviennent occasionnant l'intervention de la police, des services d’urgence, des pompiers, des services de la voirie. Qui en sera de sa poche ? Les coûts seront-ils mutualisés impactant de fait une franche de la population qui n’emprunte pas cette portion de voie ? Au contraire seront-ils directement supportés, sur le champ, par ceux qui se sont rendus responsables d’accidents ? Chacun ainsi peut tirer avantage d’une décision mais se causer mutuellement des pertes dont les conséquences collectives seront bien supérieures. Il va de soi que tous peuvent ensuite être en accord avec le résultat que collectivement ils ont contribué à faire émerger. Le plus souvent ce sera le cas mais parfois ils en déploreront les effets ou en dénonceront les méfaits sans même supposer en être à l’origine. Il n’y a aucune raison qu’il en soit autrement car aucun programme, aucune volonté, aucun dessein n’accorde les actions individuelles à la réalisation d’un projet collectif. Il n’y a aucune raison à cela pour la simple et bonne raison que personne n’en a formé le projet. On peut maintenant s’en désoler, mais il n’y a aucune garantie que cet entrelacs de décisions, menées de proche en proche, au jugé, aboutissent, dans le temps et l’espace, à une répartition collective satisfaisante dénuée de conséquences dommageables. Maintenant, les problèmes auxquels nous nous attaquons sont énormes. Leurs trouver une solution même incomplète relève déjà de l’exploit.

 

Un ordre spontané 

 

Ces problèmes d’encombrement sont merveilleux. Ils sont de parfaites illustrations de ce que des groupes humains peuvent parvenir à faire ensemble sans pour autant se connaître, communiquer leur accord ou même s’aimer. Ce système d’interactions donne naissance à un ordre. L’ordre résulte de la somme des interactions locales. Il est un effet de la composition de comportements individuels entretenus localement qui se répondent. Chacun réagit au final au comportement de l’autre et vice et versa. Les comportements, les attitudes, les activités sont contingentes et dépendent de ce que l’on anticipe du comportement de l’autre. L’ensemble dresse ainsi le portrait d’un monde au sein duquel la réussite des uns dépend de ce que font les autres. Cela marche parce que la réussite de tous dépend de la garantie apportée à chacun de parvenir à ses fins et de satisfaire leur besoin. Pour une large part, nous nous comportons comme nous espérons que l’autre se comportera à notre égard. La règle d’or constitue la racine de ces conduites dont on trouve de nombreuses déclinaisons. Mais quelles sont donc ces formes générales de conduite qui lorsque que nous les mettons en œuvre ont la propriété de conduire à la constitution d’un ordre ? Premièrement, elles sont d’un nombre extraordinairement plus limité que l’infinie variété des objectifs poursuivis par ceux qui les mettent en application. Elles tendent à limiter l'éventail des comportements possibles d'un individu et à les intégrer dans une organisation sociale dont le fonctionnement ne fait pas l'objet de discussions perpétuelles.

Observons. Des petits groupes se forment au seuil du carrefour. Une grappe de véhicules se forme et parvient à se désolidariser du chapelet de véhicule. Cette grappe force le passage, obtenant des véhicules venant à leur gauche qu’ils s’arrêtent. Maintenant, le flot de véhicules empêchés s’autorisent à passer. Une règle simple prévaut. Si je laisse passer, j’entends passer à mon tour et laisserai passer au tour suivant. Alternativement, le chapelet de véhicules laisse échapper une grappe de voitures auquel succédera une autre grappe. Combien de véhicules forment une grappe, à quel rythme se détache-t-elle du chapelet ? Simple. De manière suffisamment régulière pour construire un motif sur lequel chacun réglera sa conduite avec l’assurance de réussir. Autre règle simple, je ralentis à l’approche d’un véhicule dont la taille ou la vitesse représente par exemple une menace. Ce ralentissement, même subtil, sans être une preuve absolue d’abandon signale mon offre de passage. Ces règles peuvent être tordues et le sont souvent et le seront encore. Mes anticipations peuvent se révéler fausses, mes attentes peuvent être déçues et nous mettre en échec de coordination. Mais dans l’ensemble mes attentes ne peuvent être systématiquement déçues sans gripper l’ensemble. Car si elles l'étaient, aucun ordre social ne serait possible. Il existe tout un champ d’actions qui ne doivent pas décevoir les attentes de ceux qui les anticipent. C’est au prix de cette stabilité, de cette régularité qu’un ordre peut se maintenir et se renforcer.

 

La convention

 

Un groupe humain est constitué de gens mus par une multitudes d'objectifs auxquels correspond une infinité de moyens pour les réaliser. Comment dans ces conditions réussir l’intégration d'une myriade de décisions individuelles en un système qui marche ? Une large part de ces problématiques complexes de coordination requiert pour être résolue l’application locale de règles simples ou de justes conduites dirait Hayek1. L’application de ces règles simples produit de la coordination et ceux qui les pratiquent réussissent de telle sorte que leur application systématique a pour effet de coordonner la réalisation de finalités multiples de gens qui s’ignorent, ne s’aiment pas, ne se connaissent pas et qui, de surcroît, n'ont aucune idée des buts que chacun poursuit. L’application de ces règles qualifie la meilleure façon de se rapporter aux autres parce qu’elle réduit les incertitudes de mon environnement en donnant de mon comportement une lecture prévisible. Ces systèmes supposent par ailleurs des règles de conduite non dictées en surplomb des intérêts individuels, ni données de l’extérieur, ni même et surtout, programmées pour réaliser la convergence des objectifs ou la recherche de leur harmonisation. Partant, chacun continue à faire ce qu’il veut. Plus préoccupés de leur affaire propre que de celles des autres et alors que chacun poursuit son propre but, tous réussissent. Bien sûr, certains effets concrets imprévisibles surgiront et pourront se révéler défavorables ou même collectivement désastreux. Mais les solutions que parviennent à construire, dans le temps et l'espace, des gens laisser libre d'interagir sans entrave, se révèlent plutôt meilleures et vis à vis desquelles aucune alternatives administrées pourraient se révéler plus acceptables.

 

Sans promesse sur l'avenir

 

Le flux autoroutier étant réglé sur la volonté de tous de satisfaire son objectif propre et parce que personne n’aurait intérêt à se vouloir du mal, tous sont garantis de poursuivre leur chemin coute que coute en minimisant ses arrêts et maximisant sa progression. A la multitude des objectifs correspond bien au contraire l’application de règles générales d’action à partir desquelles chacun poursuivra de régler sa conduite sur la conduite des autres de telle sorte que leur mise en œuvre ne menacera aucun objectif particulier. En quelque sorte, je souhaite moins l’échec de ceux avec qui je me rapporte que ma propre victoire. Se faisant, alors que personne n’est a priori disposé à faire une bonne action, le flux apparaît au niveau de l’agrégat que constitue la situation d'encombrement, n’être au contraire qu’une succession de comportements bienveillants. Ces règles marchent parce qu’elles sont réciproques. Elles organisent, dans l’espace et le temps, des régularités qui se déploient en chaîne et qui apportent une chance à chacun de s’y régler pour le bénéfice de tous. L’application de ces règles permet au flux autoroutier de se maintenir parce que leur respect ne déçoit pas les anticipations de ceux avec lesquels ils se rapportent. Si tous peuvent s’attendre à un comportement régulier et prévisible alors chacun saura pouvoir compter sur l’autre sans même se parler, s’aimer ou se connaître et saura m’adresser en retour une invitation à agir pour un bénéficie mutuel ? Cette règle est une promesse de succès, une promesse sur l'avenir et sera sélectionnée parce qu’elle réussit ou parce que ceux qui les ont pratiqués sont sortis gagnants.

 

Ces règles pourront devenir explicites, leur application devenir des lois. Elles seront encouragées, rémunérées, transmises, enseigner. Ce sont des règles qui tentent d’énoncer une série d’actions dont le respect a pour effet de donner naissance à un ordre complexe. Ces règles n’ont pas initialement été inventées formellement, personne ne les a voulues ou même découvertes. Elles permettent de répondre à des situations d’ailleurs trop complexes pour que ces règles puissent avoir été programmées, calculées ou établies à l’avance. En conséquence, la seule façon raisonnable d’agir dans ce contexte d’incertitude est d’adopter une règle générale de conduite qui garantit la réciprocité de l'échange, l’établissement d’un comportement dont le caractère prévisible garantit une relation gagnant/gagnant au-delà de desseins particuliers.

 

 


Friedrich Von Hayek, Droit, législation et liberté -

 

 

 

 

 

 


28/03/2015
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Oxford Street : une dose de désordre, une chance de succès en plus ...

Noël sur Oxford Street

 

Si la période de noël joue sur le moral des consommateurs, il est indiscutable qu'elle joue également sur la vitesse moyenne de leurs déplacements. Cette relation vous paraît-elle aller de soi ? Pour arpenter le 2 000 mètres d'Oxford Street, un piéton Londonien affichera une vitesse moyenne horaire de 6 kilomètres en période normale. A Noël, ce même piéton, verra cette vitesse divisée par deux. Imaginez simplement qu'il lui faudra 38 minutes pour franchir ces 2 kilomètres. Lorsque des milliers de "shoppers", motivés par le même objectif, décident de coloniser une portion de chaussée, la situation peut très vite s'enflammer et les piétons devenir enragés. Malgré son apparente légèreté cette problématique a conduit la ville de Londres à prendre les choses en main. Elle s'est ainsi interrogée sur l'opportunité de diviser la voie en deux lignes de circulation ; l'une garantirait aux piétons une vitesse de marche rapide, la seconde, longeant les vitrines des magasins, serait réservée à une déambulation lente offrant ainsi aux touristes la possibilité de lécher les vitrines à leur convenance. Cette opération nommée Tugboat date d'une quinzaine d'années. Elle n'a pas été généralisée sur toute la longueur de la rue même si certains de ses principes ont été en revanche régulièrement revisités par des collectifs de commerçants excédés des impacts que suppose cette situation sur leur chiffre d'affaires d'une part et sur la sécurité des touristes d'autre part.

Cette solution pour évidente qu'elle puisse paraître pourrait non seulement se révéler inutile mais également contreproductive. En effet, lorsque des piétons sont laissés libres de se déplacer en direction opposée dans un même lieu, le flux initialement mêlé tend naturellement à se scinder en deux lignes séparées de marche. Forcer l'établissement de ces autoroutes piétonnières plutôt qu'en accompagner l'émergence pourrait malheureusement se retourner contre ceux qui ambitionnent de réguler le transit piétonnier en produisant l'encombrement monstre tant redouté.

 

Un ordre spontané

 

Si l'on veut bien au préalable faire l'effort de se concentrer sur ce qui se passe en marge des vitrines, nous constaterons que les interactions entre piétons sont à l’origine de comportements collectifs étonnants. Les piétons accomplissent même de véritables prouesses. Ils marchent de manière fluide et précise sans entrer en collision et en se jouant des obstacles que constituent les centaines de congénères avec lesquels ils partagent le même but sinon les mêmes trottoirs encombrés. A vrai dire, chaque piéton se rend capable d'un type de marche dont chaque pas trouve à se coordonner avec ceux des voisins conférant à l'ensemble du flot humain une forme d'organisation en peloton tout à fait surprenante. Cette marche implique évidemment de ralentir pour éviter la collision. Elle requiert par ailleurs de combiner plusieurs mouvements du haut du corps. La marche s'accomplit tête haute afin de voir loin au dessus de l'épaule du piéton que l'on précède. Le corps incline légèrement ensuite afin de favoriser un éventuel changement de direction. Les messages sont rapides, les invitations sont données avec obligeance, les intentions sont mises en scènes et appuyées du corps sans ambiguïté de sorte que chacun puisse, par ajustements rapides, s'accorder avec le mouvement de tous les autres. Le problème que la foule résout est analogue au problème de coordination qui siège au cœur d'un embouteillage. Ce qu'un piéton fait ou décide influence ce que les autres font, et vice et versa. Par conséquent, les piétons doivent leur progression au fait qu'ils anticipent la réaction de ceux avec lesquels ils se rapportent. Le succès de leur progression n'est dû à aucune instruction centralisée qui, de l'extérieur, dicterait la bonne façon de s'assembler. Nous sommes ici en présence d'une multitude de décisions décentralisées qui se reconfigurent au gré de la contingence de relations entretenues par des personnes qui ignorent au final à quoi ressemble une bonne façon de s'assembler. Les piétons décident dans l'instant ce qu'il font en coordination avec tous les autres et contribuent ainsi à la formation d'un ordre spontané. Comment cet ordre spontané se forme-t-il et quels sont les comportements qui en déterminent l'émergence.

 

Des piétons, certes mais pas des marionnettes

 

Les premières pistes de modélisation, apparues au début des années 70, se proposaient de formaliser le déplacement des piétons à l’aide des outils de la physique ou de ceux de la mécanique des fluides¹. Le comportement du piéton était assimilé à celui d’une particule dans un gaz et celui de la foule au mouvement d'une rivière. En 1995, le physicien Dirk Helbing² proposa de considérer le déplacement d’un piéton à l’aide d’un système de jeu de forces bipolaires qui « attirent » le piéton vers sa destination d'une part et le « repoussent » des autres piétons d'autre part. Maintenant pour explicatifs qu'ils puissent être, ces modèles laissent de côté certaines dimensions sociales dont les particules sont bien évidemment dépourvues. Les piétons sont dotés de raison au sens où ils ont un motif et leurs décisions sont intentionnelles. Ils peuvent choisir de cheminer en petits groupes et de le rester quelque soit les évènements. Ils peuvent manifester certaines préférences selon la contingence de leurs rencontres ou même se conformer à une convention telle que celle par exemple de doubler à droite. Le piéton n'est pas agit par des forces qui lui seraient uniquement externes. Il n'est pas non plus soumis à des forces obscures d'un je ne sais quel arrière fond psychologique. Le piéton est un acteur intentionnel qui fait montre de compétences, notamment visuelles. Certaines expériences² ont montré tout d’abord qu'il s’oriente en direction de l’espace libre où l’encombrement de son champ visuel est minimisé. Ensuite, il sait ajuster sa vitesse de manière à conserver une distance de sécurité par rapport aux obstacles qu’il perçoit. Ces deux règles ont paru suffisantes pour obtenir les mêmes prédictions que le modèle des forces sociales, mais de manière beaucoup plus simple.

 

L'auto-organisation

 

Quand on laisse une foule libre de se former, il est fréquent de constater que le flot des piétons se scinde spontanément en deux lignes de piétons progressant en direction opposée ; l'une occupant une moitié du trottoir tandis que l'autre se réservant l'autre moitié. Cette configuration est repérable par exemple dans le métro où les couloirs contraignent les déplacements. Sans que les piétons n’en aient formés le projet mais sans jamais pour autant cessés d'en être les protagonistes, une organisation collective plutôt intelligente émerge. Elle est un effet de composition ou encore un produit de l'agrégation de règles locales d'évitement répétées de proche en proche. L'une des conséquences de la répétition de cette règle simple est de réduire la variance des comportements au sein d'un groupe et de donner une lecture prévisible du comportement de chacun. Ce pattern collectif forme une solution plutôt efficace à un problème de coordination car il améliore la qualité du trafic en réduisant notamment les risques de collision. Il s'agit d'une forme auto-organisée qui ne dépend pas d'une volonté externe ou d'une décision centralisée. Cette organisation ne provient pas de forces extérieures mais de l’interaction de ses éléments. L'ordre est produit de l'intérieur, les files de piétons émergent des interactions locales entre les individus. Chaque piéton poursuit son but même s'il demeure rigidement connectée aux comportements de ses proches voisins.

 

La mécanique de l'univers 

 

Concernant la formation des lignes piétonnières, une expérience en laboratoire mérite d'être relatée. 60 participants ont été conduits à rejoindre un couloir en forme d'anneau. La moitié d'entre eux avait pour consigne de marcher dans un sens et l'autre moitié dans le sens inverse. Les participants, placés initialement au hasard dans le couloir ont donc commencé à se déplacer dans le respect de la consigne. Comme prévu, à l'issue d'une poignée de secondes, et sans que quiconque ne donna aux participants de nouvelles consignes, deux files de piétons se distinguèrent parfaitement du flot initialement mélangé³. Les piétons se sont donc partagés spontanément l’espace disponible pour former une sorte « d’autoroute à piétons ». Mais le plus intéressant est à venir. Au terme d'une certaine période, un mouvement cyclique apparaît où le désordre succède à l'ordre, et ainsi de suite. Ce phénomène instable est dû, pour une large part, à la coexistence de vitesses différentes de marche. Lorsque la marche des piétons les plus rapides est gênée par celle des plus lents, les premiers quittent leur file pour doubler et retrouver ainsi leur rythme de progression. La désorganisation du flux piétonnier survient autrement dit lorsque un piéton rapide, décidant de doubler, provoque le ralentissement du flux opposé déclenchant une réaction en chaîne qui se propagera de manière rétrograde dans le couloir et dans les deux sens de marche. L'opposition du flux adverse saura reconduire le contrevenant dans le rang et le flot pourra de nouveau se scinder. Ces alternances sont d'autant plus fréquentes que les vitesses de marche entre les piétons sont hétérogènes. En fait, pour en atténuer la survenue, les piétons doivent tenter de se synchroniser sur le pas de la personne la plus lente. Cependant, adapter sa vitesse de marche est souvent compliquée dans un univers de décisions décentralisées où, de surcroît, personne n'est en capacité de communiquer son accord. Par conséquent, sans le vouloir, c’est en tentant de maintenir leur vitesse que certains piétons réduisent la qualité du déplacement du groupe affectant, au final, comme un choc en retour, leur propre course. Il va de soit que la stabilité de l'ensemble dépendra donc précisément de la capacité de chacun à régler sa course sur une vitesse harmonisée. Cette mécanique universelle est réalisable si chaque piéton tient compte à la fois de lui-même et du groupe. Mais dans ce flot, personne ne forme l'objectif d'harmoniser son intérêt avec l'intérêt collectif. Il se trouvera toujours un plus rapide, un plus malin, un plus pressé pour saper la course de l'ensemble.

 

Une dose de désordre pour une chance de succès

 

Les commerçants de la rue d'Oxford sont bien partis pour buter sur l'obstacle qu'ils se proposent justement de lever. La tentative de forcer la formation de deux files piétonnières aura probablement pour conséquence, dans un premier temps, de favoriser l'augmentation du nombre de piétons dont la vitesse de déplacement aura été protégée par des lignes organisées. Comme toujours, lorsque le nombre de piétons augmente, la distance séparant deux piétons diminuant, on constatera un ralentissement progressivement du flux mais une augmentation du débit. En bref, il est facile de comprendre que la vitesse de déplacement des piétons évolue en raison inverse de leur concentration car plus il y a de piétons moins il est facile de progresser. Dans cet état, porté à ses valeurs limites, le flux piétonnier n'aura jamais été aussi proche de sa congestion. Pour s'en convaincre, il suffit d'imaginer qu'au sein de files gonflées exagérément, le moindre dépassement sera la source de perturbations dont les effets seront amplifiés à raison même du nombre de piétons.

En essayant de conserver aux flux de piétons sa capacité à vivre le désordre plutôt que de chercher systématiquement à en accroître l'ordre, les périodes où l'ordre succédera au désordre seront toujours préférables à un flux qui menacera de s'interrompre totalement. Certes, dans un cas, un débit excellent sera contrebalancé par une vitesse plus faible. Dans le cas où les files sont laissées libres de se former, nous constaterons le phénomène inverse. D'un point de vue pratique, l'ordre et le désordre, représentent des variables dont on peut accompagner la survenue en réglant légèrement les conditions qui en favorisent l'émergence. Les files de circulation doivent-elle être symboliquement signalées par des panneaux, simplement tracées sur le bitume ou encore physiquement établies par des barrières ? En surplomb des files, un agent pourrait réguler les entrées dans la file ou interdire le doublement. Une solution plus coercitive consisterait à régler le cadencement du pas ainsi que la distance entre deux piétons. La marche au pas militaire ressortit précisément de cette dynamique. Le jeu consiste à se rapprocher d'un seuil aux environs duquel le flux reste optimal. Dans la plupart des systèmes où les interactions locales dominent, les individus tirent un avantage plus important dans l'établissement de leurs relations lorsque celles-ci sont justement laissées libres de se faire et de se défaire hors de toutes commandes extérieures. Les interactions étant plus flexibles et se recombinant au gré des situations, l'adaptation de l'ensemble gagne en réactivité. Par ailleurs, les quelques piétons qui décident de traverser en dehors des clous contribuent à eux seuls à améliorer le transit du flot piétonnier qui emprunte un passage cloutés - - cf order from Switzerland -. S'ils ne le faisaient pas, le flot des piétons serait parfois trop important et risquerait de s'agréger sur le trottoir d'en face, si tous en adoptaient la pratique, les véhicules seraient empêchés de circuler. Où se trouve le niveau optimal ? Soyons pragmatiques, jouez simplement en augmentant la dose d'ordre jusqu'à connaître la limite au-delà de laquelle le système se retourne.  Passé un certain seuil, des repères externes au jeu peuvent être donnés pour donner une solution collective aux interactions.

 

 


 

¹ Les théories sont toujours empreintes du matériel conceptuel ou technique prégnant au moment de leur élaboration ou leur construction s'étaie sur les faits observables propres à une époque. Le modèle de l'inconscient de FREUD n'échappe pas à la règle. il reste établit au mieux sur un schéma électrique ou sur celui de l'écoulement des eaux usées de sa bonne ville de Vienne de 1905.

² http://www.mehdimoussaid.com/archives/119

³ http://www.mehdimoussaid.com/archives/20 : Walking with the flow

 


28/03/2015
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Faire d'un âne un joueur de foot

L’excès d’ordre

Dans le contexte d’incertitude que connaissent nos entreprises, ils se trouvent encore de nombreux DRH suffisamment confiants pour accepter d’ânonner béatement les postulats d’une doxa managériale dont les promesses sont sensées redonner aux équipes dirigeantes la maîtrise de leur organisation et le contrôle des hommes qui les composent.

 

Difficile de faire autrement, pour nous DRH, puisque nous sommes payés pour cela.

 

Or, pour tous ceux qui ont la responsabilité de conduire des hommes et de développer des organisations qui réussissent, l’expérience quotidienne nous est contraire. Le comportement humain est peu prévisible et il paraît vain de vouloir en guider les choix, réguler les préférences et surtout décider d’en administrer les échanges ou d’en gouverner les relations. Imaginer régler la bonne volonté de chacun à agir de conserve ou produire de la coopération comme on force l’emboîtement de pièces mécaniques a toujours constitué, en filigrane, l’enjeu principal des pratiques managériales. Il est vrai que soulager nos entreprises des stratégies individuelles éparses, et sans lien avec la recherche d’un objectif commun est légitime pour des organisations dont la finalité reste la rentabilité et le profit. Les pratiques managériales font cependant faillites et paraissent avoir peu de prise sur le gouvernement des hommes. Pis, leur usage intensif et systématisé, parvenant à ignorer la personne qui est derrière chaque salarié, incite ces derniers à trouver des marges de manœuvres leur assurant de se jouer d’un contexte devenu rigide.

Jouant ainsi leur jeu plutôt que celui de l’entreprise, les salariés ne se comportent pas comme prévu : ils se retirent, mesurent leurs efforts, se replient, font montre de violence, minent le travail des autres ou sapent le bien fondé de nombreuses initiatives collectives. En réaction, les dispositifs managériaux se complexifiant nécessairement, d’autres effets non voulus surgissent auxquels répondront d’autres contrôles … A ce rythme, l’excès d’organisation parvient même à favoriser l’expansion de problèmes que les organisations ambitionnent de combattre. La liste des situations qui se dérobent à nos tentatives de contrôle est à cet égard vraiment impressionnante et au final, au lieu de se retrouver à la tête d’organisations pacifiées, novatrices et efficaces, les DRH passent leur temps à déminer les effets contraires produits par des décisions aussi inutiles que contreproductives.

 

Les incitations financières

 

Maintenant, plutôt que d'obliger des volontés libres avec la plus grande peine, une autre attitude, plus intelligente et plus souple, peut consister à encourager en jouant sur l’intérêt individuel bien compris des salariés. Les organisations cherchent alors à s'allier le consentement des salariés, à favoriser leur autocontrôle en assouplissant les mesures de contrôle. L’objectif des incitations financières étant simplement de démontrer aux salariés qu’ils ont plus à gagner à être loyaux que de tricher, dit autrement encore, qu'il est plus rentable de fournir l'effort demandé que de faire défection.

Les incitations financières jouent par ailleurs les deux faces d’une même médaille ; elles favorisent la production de comportements attendus d'une part, et dissuadent la survenue de ceux qui pourraient entraver la performance recherchée d'autre part. Ces dispositifs incitatifs se déploient désormais dans un foisonnement bien établi de primes, bonus, variable, LTI, stock options et autres garanties qui tous rivalisent pour travailler l’entretien de la relation au travail sur le court ou long terme. Les modalités ont été rafraichies, leur communication revue, mais les fondements de ces pratiques demeurent inchangés. Ils sont servis par une mécanique élémentaire conditionnelle dont le ressort premier suppose que les conduites humaines peuvent être encouragées ou au contraire dissuadées. Idée qui se révèle à court terme soutenable, mais bien peu pertinente à plus long terme. En bref, tout cela peut se résumer très simplement : si vous faites ceci, vous pourrez obtenir cela, ou le perdre, si vous vous dispensez de faire cela, vous gagnerez, ou selon, perdrez ceci. Or, s’il est vrai que ces incitations changent les comportements de ceux qui en sont la cible, ce changement ne prend pas toujours le sens escompté.

Maya BEAUVALLET[1] cite le cas d’un footballeur qui à l’examen s’avère être meilleur défenseur que bon passeur. Il prend le ballon, mais le redistribue souvent et malencontreusement à l’adversaire. Son club propose une solution imparable. Pour balancer ce défaut de pratique, il est décidé de créer une incitation financière qui le conduira à améliorer son jeu. On lui infligera donc une pénalité financière chaque fois qu’il rendra la balle à l’équipe adverse. Les résultats furent contrastés mais surtout contraires à l'objectif. Le joueur devint économe, radin de passes même. Il garda le ballon le plus souvent possible. Son attitude eut bien pour effet notable de priver l’adversaire de ballons, mais également celui plus inattendu, d’en priver ses coéquipiers. Cet exemple est intéressant car on ne sait jamais à l’avance ce qui peut advenir d’un dispositif incitatif sauf celui de placer son auteur dans la position de l’arroseur arrosé.

 

Zlatan Ibrahimovc

 

Avec l'acquisition de Zlatan Ibrahimovic puis de celle d'Edinson Cavani à l'été 2013, le PSG en vint très vite à réfléchir aux meilleurs moyens pour inciter ses deux buteurs à coopérer sur le terrain. Bien que trivial, ce problème reste de taille pour le succès de ce club car il s’agit non seulement de faire cohabiter ces deux attaquants payés à prix d'or dans les seize mètres carrés d'une surface de réparation mais également de bénéficier de tout le talent de Cavani sans nuire à celui d’Ibrahimovic et réciproquement. Pour les dirigeants du club, un système de primes individuelles de performance a été très vite mis en place pour répondre à cet enjeu. Le contrat de travail des deux stars fut aménagés et des rôles différents et complémentaires leur furent assignés[2].

Pour Zlatan Ibrahimovic, une passe vaut un but. Il percevra en sus de ses 12M€ net d’impôts, l’équivalent d’un 13ème mois sous condition qu’il réalise le meilleur total conjoint de buts et de passes décisives du championnat de France. La notion de passes décisives a même fait l’objet d'une description précise afin de rendre le décompte indiscutable. Cavani sera, quant à lui, récompensé d’une prime plus modeste de 750K€ s’il finit meilleur buteur. Au final, nous avons deux rôles qui se combinent : un Passeur / Buteur et un Buteur.

Que disent les experts. « On voit bien que Cavani joue pour Ibra » et de poursuivre « Cavani oriente ses courses en fonction de lui, et à force d’efforts, il arrive à avoir des occasions et à marquer en fin de match » « Il s’adapte » concède un équipier dont je renonce à retenir le nom. Zlatan Ibrahimovic et Edinson Cavani, n’ont semble-t-il jamais été pris en "flagrant délit d'individualisme". S’entendent-ils ? « Le fait que les deux marquent favorise la cohabitation. Mais si l’un des deux devait se détacher ? Cavani m’a l’air de quelqu’un de bien éduqué. J’imagine qu’il prendra sur lui ». Pour l’instant, en apparence, Zlatan Ibrahimovic et Edinson Cavani respectent les règles qui continuent de faire d’eux les d’attaquants phares du PSG.

Les incitations financières mises en place par le club paraissent donc donner raison au club. Mais pourraient-elles conduire à d'autres effets moins attendus, voire contre productifs. Ce système incitatif pourrait-il notamment porter Cavani ou Ibrahimovic à devoir s'obstiner ou à préférer certaines attitudes au point de faire naître d'autres équilibres ?[3]

 

Lorsque Ibrahimovic estimera être le mieux placé pour marquer, il tentera sa chance, sinon il passera. Sa décision sera donc guidée selon que l'une des alternatives fonctionne mieux que l’autre. Compte tenu du placement sur le terrain de Cavani, et en raison de son talent de buteur, ce dernier aura une probabilité plus élevée d'être le récipiendaire naturel de la passe d'Ibrahimovic ; celui-ci n’ayant par ailleurs aucun intérêt à solliciter un partenaire moins doué devant le but puisque cela réduirait la probabilité que sa passe soit décisive. En d’autres termes, les intérêts d’Ibrahimovic semblent conformes à ceux du PSG. Maintenant, pour les mêmes raisons il se peut également que Cavani devienne également le récipiendaire des passes de tous les autres joueurs. Dans cet esprit, Cavani n’ayant de surcroît aucun d’intérêt financier à passer la balle à son co-équipier, il n'aura de cesse de multiplier les tirs dés que l'occasion se présentera. Cette attitude pourrait avoir un risque majeur notamment s'il ne parvient pas à exploiter décisivement chacune des passes qui lui sont faites.

Si Cavani s'évertue en effet à tirer à chaque touche de balle, y compris lorsque cela ne paraît pas justifié, son ratio buts sur tirs pourrait en être remarquablement affecté. Cela pourrait alors constituer un signal suffisamment fort pour conduire Ibrahimovic à progressivement préférer tirer plutôt que de passer ce qui, du reste, permettrait à ce dernier de passer devant Cavani en tête du championnat des meilleurs buteurs. La question reste : 1.5 M€ peuvent-ils balancer ce risque et forcer Ibrahimovic à préférer passer que de tirer ? D'autres combinaisons ou équilibres sont évidemment possibles. Nous connaissons les règles mais sommes bien incapables de savoir comment ces deux joueurs règleront leurs conduites. Quels comportements, parmi l'entraide ou la défection, choisiront-ils de privilégier et quels poids auront ces incitations financières dans leur décision ?

 

Le résultat du championnat est toutefois sans appel car il sacre, en 2013-2014, le Paris Saint-Germain pour la seconde année consécutive.

 

Mettre en œuvre ces dispositifs nécessite une compréhension des organisations et une certaine expertise concernant les ressorts des motivations extrinsèques. Si les incitations financières peuvent être efficaces pour inciter à fournir un effort inhabituel, voire contrer l'évitement du travail, ils montrent en revanche toutes leur limite lorsqu’il s’agit d’améliorer la capacité des salariés, d’accroître leur intelligence ou même de favoriser la présence de comportements responsables ou éthiques.

Toutes choses, croyez-moi, hors de portée d’un dispositif d’incitations financières.

A-t-on vu un collaborateur incompétent devenir subitement compétent parce qu'il est bénéficiaire d'une prime ? Certains le croient et pour être sérieux, je m’en désole. Edinson Cavani et Zlatan Ibrahimovic sont certainement talentueux et le resteront mais ce n’est pas 1,5 M€ supplémentaires qui fera d’un âne un bon joueur de foot.



[1] Maya BEAUVALLET Les Stratégies Absurdes – Seuil 2009 - p 11

[2] Le Parisien du 25 octobre 2013 –

[3] www.econoclaste.org.free.fr - Deux mots sur une prime - et www.sofoot.com


26/03/2015
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Virgin MégaStore : Demain ce sera vous !

Virgin MégaStore : demain ce sera vous !

 

 

 

 

Le comportement de solidarité et d'entraide qui a pu être observé dans les escaliers des tours jumelles des Twin Towers juste avant leur effondrement est venue étayer la description d'un homme bon et généreux par nature. Pas de bousculades. De manière disciplinée et civique les salariés des tours se sont sagement organisés pour rejoindre les étages inférieurs puis la sortie. Les hommes ont aidé les femmes, les forts les faibles, les valides les invalides alors que tout menaçait de s’effondrer.

L'horreur économique de l'homme rationnel guidé par la recherche de son seul intérêt devait être remisée ; en clair l'objectif de sauver son cul au détriment du commun faisait pschitt ...

 

Ouf, Virgin Mégastore rétablit le modèle, l'homme de l'intérêt réapparaît.

 

Avec Virgin Mégastore, le consommateur, reput au marché, se déprend de tout ce qui fait société. La situation est prodigieuse.

Cette enseigne rend l'âme et c'est l'occasion que se donne une masse avide pour fouler cette carcasse encore chaude. L'homo œconomicus est vigoureux. L'homme de l'intérêt nous apparaît plus clair encore.

Cet homme est visible, c'est vous, nous, celui qui ne s'arrête pas pour accueillir chez lui l'homme de la rue qui mendie.

 

Si nous avions une guerre, .... le danger viendra duquel de vos voisins ? commencez à vous dénoncer vous gagnerez du temps !


17/05/2013
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Léonarda : Nous n'aimons pas ce dont nous sommes capables.

Dieu se rit des hommes qui se désolent des effets dont ils chérissent les causes ...

 

Nous vivons libres mais souhaitons être protégés de l'excès de liberté des autres. En un sens, nous renonçons à une liberté totale pour n'en conserver qu'une parcelle. Renoncement salutaire pour éviter de nous trouver un jour confrontés au droit d'un plus fort qui se serait senti plus libre.

 

 

Cet exercice nous contraint mais acceptons bien volontiers en retour cette restriction. Cela nous coute. Cher, très cher mais acceptons là encore d'en payer le prix. L'impôt en matérialise le contrat. Nous payons des institutions, élisons des représentants, légiférons pour un égal accès aux routes, à l'éducation, à la santé mais poursuivons d'ignorer les mûrs qui en régulent les accès. 

 

Avec LEONARDA, une brèche s’entrouvre et notre ignorance ne peut plus être feinte.

 

Nos dispositifs de protection fonctionnent. Les mûrs montés se révélant efficaces ils justifieraient donc l'effort que nous consentons - 100 000 entrées irrégulières aux frontières contre 18 000 reconduites en moyenne par an sous l'ère VALLS -.

 

Cette situation matérialise pourtant notre modèle social. Mais lorsque les mûrs fonctionnent, c'est l'occasion collective de nous offusquer du fond de nos forteresses pour juger la pratique indécente ! Nous nous refusons de croire à ce modèle social dont nous sommes pourtant à l’origine. Merde, le prix de ma liberté suppose que cette personne soit écartée. Ben oui mon ami, là est tout l'enjeu.

 

Je rigole à l'instar de BOSSUET. Je rigole de la bienpensance prégnante qui a encore voulu, par procuration évidemment, jeter notre jeunesse dans la rue pour fustiger ce système qui est justement celui auquel nous tenons tous. Je rigole de ceux qui se font déborder par les conséquences de règles dont ils ont pourtant contribué à mettre en œuvre.

 

Nous n'aimons pas au final regarder en face ce dont nous sommes capables. Nous n'aimons pas le monde que nous faisons, mais nous le faisons et continuerons à feindre d'en être responsable.

 

 

 

 

 

 


20/10/2013
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Le con

Le con ne se coordonne pas. C’est même à ça qu’on le reconnaît.

 

Le con ne se coordonne pas. De son propre chef ou bien malgré lui, le con est en défaut de coordination. Le con ne se coordonne pas et il déçoit les attentes de ceux avec qui il échoue à régler sa conduite.

 

De nombreux ouvrages abordent le sujet. "Vivre avec des cons", "Travailler avec des cons". Dans "Objectif Zéro-Sale-Con[1] l'approche que développe Robert SUTTON reprend l'idée générale qui sou-tend les analyses produites sur les cons. Dans ce « Petit guide de survie face aux connards, despotes, enflures, harceleurs, trous du cul et autres personnes nuisibles qui sévissent au travail » il relate les nuisances dont les cons sont porteurs, pour les individus comme pour les organisations elles-mêmes. Il énumère les 12 vacheries dont les cons peuvent se rendre coupables. Nous passons toutefois à côté des ressorts du con. En effet, cet ouvrage comme tant d'autres, s’inscrit dans la lignée des travaux de Christophe Dejours sur la souffrance au travail ou dans celle qui traite du harcèlement moral et de ses conséquences. Chapitre 1, Robert SUTTON tente pourtant une définition. Il dépeint l'attitude du con mais il ne dit rien du défaut de coordination pourtant central dans la façon dont le con se rapporte aux autres. Il dresse le portrait du sale con sous les traits d’une personne qui nous irrite, se met en travers de notre chemin ou qui réussit mieux que nous. Il ajoute que le con est une entrave, un frein, un problème sans pour autant inscrire la source de ce déséquilibre dans le rapport d'attentes déçues. Au final, il parle du sale con mais ne traite pas du simple con. Celui qui, loin de faire profession de nuire à l'autre, échoue tout simplement dans sa relation parce qu'il ne répond pas aux attentes des autres. Il en déçoit les anticipations. Il est en avance ou il est en retard et c'est la raison pour laquelle il échoue à satisfaire les attentes de ceux avec lesquels il se rapporte. Je le concède, les entreprises sont des nids à sale cons, elles en sont même le cocon. Les impacts sont dévastateurs en termes de coûts induits et même directs. Je côtoie des sales cons, j’en ai côtoyé, de sérieux même et parfois même doublés d’une incompétence crasse. Mais pour mieux comprendre, il faut avant toute chose mieux saisir le déséquilibre des échanges qui sous-tend la relation avec un con.

 

 

Atterrissage du Vol AF - Paris Charles de Gaulle -. Annonce habituel du chef de cabine. "Nous vous rappelons que votre ceinture de sécurité doit rester attachée jusqu'à l'extinction de la consigne lumineuse. Nous vous rappelons que l'utilisation des téléphones portables n'est autorisée qu'après l'arrivée à notre point de stationnement. Lors du débarquement, nous vous demandons d'ouvrir les coffres à bagages avec précaution afin d’éviter la chute d'objets. Seul, et rapidement suivi par d'autres, débout dans la travée de l'avion, le con aura d'ores et déjà détaché sa ceinture, ouvert son i phone, ouvert le coffre à bagage et précipité son contenu sur la tête des passagers restés assis. Défaut de coordination.

Autoroute A13, à la descente d'ORGEVAL direction Paris, le flux automobile est fluide, seul un camion au loin entame son dépassement. Alors qu'il se positionne sur la voie de gauche pour doubler avec peine son homologue, et sans même se soucier du préjudice dont il sera la cause, il poursuit sa manœuvre dont le principal effet sera de créer, sur une autoroute au trafic initialement fluide, le long chapelet de véhicules caractéristique du piège à cons. Défaut de coordination, vous dis-je.

 

Un con est avant tout une personne qui échoue à régler sa conduite sur celle des autres. Il devance ou est en retard.

 

Quand j'ai couru chanter ma p'tite chanson pour Marinette
La belle, la traîtresse était allée à l'opéra
Avec ma p'tit chanson, j'avais l'air d'un con, ma mère,
Avec ma p'tit chanson, j'avais l'air d'un con.

 

Quand j'ai couru porter mon pot de moutarde à Marinette
La belle, la traîtresse avait déjà fini d'dîner
Avec mon petit pot, j'avais l'air d'un con, ma mère,
Avec mon petit pot, j'avais l'air d'un con.[2]

 

 



[1]Robert SUTTON Objectif  Zéro-Sale-Con Ed. Vuibert 2007

[2] Marinette Chanson de Brassens


16/02/2014
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J'emmerde

Répliques de La 25e HeurE

réalisé par :
écriture :
avec : , ,
© 2002 40 Acres & a Mule Filmworks

 

J'emmerde  (vidéo )

 

"Moi aussi je t'emmerde, je vous emmerde tous autant que vous êtes !
J'emmerde cette ville et tous ces habitants.
J'emmerde les zonards qui font la manche aux feux rouges et qui s'foutent de ma gueule dès que j'ai le dos tourné.
J'emmerde ce mec avec son chiffon qui prend un malin plaisir à saloper mon pare-brise. Trouve un boulot connard !
J'emmerde les Sikhs et les Pakistanais qui conduisent à fond la caisse des taxis en ruine et qui empestent le curry par tous les pores de leur peau, tous des terroristes en puissance, roulez moins vite putain !
J'emmerde les p'tits mecs de Chelsea avec leurs pectoraux épilés à la cire et leurs biceps gonflés aux hormones, qui se taillent des pipes dans les allées de mes parcs ou sur mes quais et que je retrouve la queue à l'air dans ma télé.
J'emmerde les épiciers Coréens avec leur pyramide de fruits au prix du caviar, leurs tulipes et leurs roses emballées dans du plastique ; 10 ans qu'ils sont là et "toujours pas bien comprendre".
J'emmerde les russes de Brighton Beach, ces mafieux qui passent leur temps aux terrasses des cafés à siroter du thé dans des p'tits verres, en suçant des morceaux de sucre. Toujours à chercher des combines pour leur petits trafics ; mais rentrez dans votre putain de pays !
J'emmerde les Hassidim avec leur petite calotte noire qui déambulent en permanence sur la 47ème rue, dans leur costard de merde, les épaules couvertes de pellicules et qui vendent des diamants sud-africains du temps de l'apartheid.
J'emmerde les Brokers de Wall Street auto-proclamés "maîtres de l'univers", tous ces Michael Douglas alias Gordon Geko à la mord-moi-le-noeud, qui inventent chaque jour de nouveaux moyens d'exploiter les pauvres et mieux piller la planète, tous ces enc*lés de chez Enron méritent d'aller en tôle jusqu'à la fin de leurs jours et d'y crever ! Et Bush et Cheney, ils n'étaient pas au courant peut-être ? Ils nous prennent vraiment pour des cons !
J'emmerde les Portoricains entassés à 20 dans leur bagnole, qui cumulent les allocs et qui nous gonflent chaque année avec leur carnaval à la con. Et alors surtout ne me branchez pas sur les Dominicains parce qu'en comparaison, les Portoricains c'est des dieux !
J'emmerde les Italiens de Bensonhurst avec leurs cheveux pleins de gomina, leurs survêtements de merde en synthétique, et leur médaille de St-Antoine, qui ne peuvent pas aligner 3 mots sans brandir leur bâte de base-ball dédicacée et qui rêvent tous de jouer un p'tit rôle dans les Sopranos.
J'emmerde les vieilles friquées du Upper East Side avec leurs foulards Hermès et leurs artichauts de chez Balducci à 50 dollars pièce, qui passent leur temps à se faire tirer la peau à coup de lifting, stretching et autres conneries de ce genre. C'est de l'argent foutu en l'air, tu bleuf personne chérie.
J'emmerde les Blacks de Harlem, ils passent jamais un ballon, ils veulent pas jouer défensif, ils font systématiquement 5 pas avant de tirer et quand ils loupent le panier, ils se retournent en hurlant que tout ça c'est la faute des blancs.
L'esclavage a été aboli il y a exactement 137 ans, alors mettez vos putains de montres à l'heure nom de Dieu !
J'emmerde ces pourris de flics qui enc*lent leurs suspects avec leurs matraques ou qui leur plantent 41 balles dans le corps, bien protégés derrière le mur bleu du silence. Vous trahissez notre confiance.
J'emmerde les prêtres qui tripotent les gosses innocents avant d'aller dire la messe. J'emmerde l'Église qui les protège, elle qui prétend nous délivrer du mal, et pendant qu'on y est j'emmerde Jésus qui s'en est pas si mal tiré, un jour sur la croix, un week-end en enfer et la gloire éternelle avec les anges qui lui chantent de beaux cantiques. Mais vas y toi passer sept ans à la prison d'Otisville, Jésus !
Et j'emmerde Oussama Ben Laden, Al Qaida, ces hommes des cavernes et tous les connards intégristes où qu'ils se trouvent. Au nom des milliers d'innocents massacrés, je prie pour que vous cramiez en enfer pour l'éternité dans une carlingue d'avion en flammes, vous et vos soixante-douze putes. Avec vos torchons sur la tête vous êtes tout juste digne de baiser mon royal cul d'Irlandais.
J'emmerde Jacob Elinsky geignard frustré, j'emmerde Francis Xavier Slaughtery, mon meilleur ami, qui me juge en matant le cul de ma femme.
J'emmerde Naturelle Riviera, je lui avais donné ma confiance et elle m'a poignardé dans le dos. Je vais passer 7 ans en cabane à cause de cette salope.
J'emmerde mon père, veuf inconsolable qui passe sa vie derrière son bar à siroter de l'eau gazeuse et à vendre du whisky aux pompiers en acclamant les New York Yankees.
J'emmerde cette ville et tout ces habitants.
Des pavillons d'Asturias aux terrasses de Park Avenue, des logements sociaux du Bronx aux lofts de Soho, des meublés d'Alphabet City aux immeubles en pierres de tailles de Park Soho aux duplex de Staten Island, qu'un tremblement de terre les rase, que des incendies les réduisent en cendres et que le niveau des eaux monte jusqu'à engloutir toute cette ville et tous les rats qui s'y terrent.
Non, non je t'emmerde toi, Mongomery Brogan. Tu avais toutes les cartes en main et tu t'es démerdé pour tout foutre en l'air".

 

Et pourtant ça tient, rien à ajouter ...


02/03/2014
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Fake to fuck

Le bon signal pour un orgasme réussit

 

Si nous partons du principe qu'un homme et une femme cherchent leur plaisir dans le plaisir de l'autre, il devient évident que la durée de leur relation amoureuse dépend de l'attention que chacun porte à entretenir cette interdépendance ; chacun des partenaires a intérêt à donner du plaisir à l'autre, puisque en retour, son propre plaisir en dépend. La relation amoureuse suppose donc un échange, une forme de coordination qui, en quelque sorte, repose sur l'intérêt bien entendu des deux partenaires. Une forme de relation harmonieuse naît donc de cet échange entretenu où le plaisir de l'un répondant aux attentes de l'autre, les attentes du couple ne pourront être déçues.

Maintenant, si l'un des deux partenaires venait à faire défection et à ne plus signaler en retour son plaisir, le cercle informationnel serait rompu et la relation amoureuse se trouverait menacée. En pareilles circonstances, la seule attitude raisonnable suppose donc de maintenir l'autre informé de son plaisir quitte à simuler ou à feindre tout simplement son propre plaisir. C'est en tout cas ce que montrent les données empiriques issues de l'enquête « l’Orgasm Survey » menée depuis 2000¹. 

Selon cette enquête, et celles qui ont suivi, il semble que de nombreux partenaires aient recours à cette supercherie pour entretenir une relation stable. 60% des femmes feignent l'orgasme, que ce soit de manière épisodique ou systématique. 80% des femmes qui simulent, estiment parfois avantageux, de produire ces simagrées et de prolonger à dessein quelques râles bien placés, pour acheter la paix et assurer la poursuite de relations harmonieuses avec son partenaire. Quand Sally simule, les attentes d'Harry sont satisfaites ce qui contribue à stabiliser le cadre de relations sexuelles qui auront des chances de se poursuivre sur la durée.

25% des hommes déclarent également feindre l'orgasme. Moins évident évidemment, même si l'usage du préservatif peut aider à masquer la supercherie. Les hommes jouent également cette comédie pour décupler le plaisir de leurs partenaires et parvenir, peu ou prou, à se synchroniser avec elles. Hommes comme femmes, tous s'accordent à régler leurs comportements sur les attentes de l'autre. La simulation est un artifice qui entretient une relation. On pourrait bien sûr, évoquer le poids important que joue la culture pornographique qui exige de la part des femmes qu'elles se plient à une montée orgasmique suscitée par un bellâtre monté comme un âne. Rien dans cette enquête ne parle de cette (quête)² orgasmique et les mascarades que nos couettes cachent reposent sur des projets différents. Ces simagrées offrent une solution efficace et simple à un problème plus général de coordination dont pourrait résulter des fins plus ou moins satisfaisantes. Or, parce que chacun des protagonistes cherche à réaliser l'intérêt qu'ils ont en commun de faire l'amour de manière réciproquement satisfaisante, la convention de duperie qui se met en place entre les partenaires, harmonise les solutions multiples en un dénouement unique construit sur un jeu d'anticipations convergentes. La convention qui s'installe entre les partenaires tendra à se reproduire parce que chacun sait qu'il a un intérêt à signaler son plaisir à l'autre qui fera de même dans un même jeu de réponse qui se renforcera. Malgré les revers habituels d'une relation sexuelle menée dans la durée, une relation stable et robuste émerge par ce jeu de croyances et de jugements réciproques entretenus qui stabilisent l'interaction. 

 

Alors oui, maintenant, nous pourrions rendre transparent aux protagonistes les trames de ce jeu et en trahir les soubassements. Dans un grand mouvement de lutte contre l'hypocrisie conjugale, bâtie sur un calcul d'intérêt, nous pourrions rendre aux femmes comme aux hommes toutes chances de vivre un orgasme réel dans la transparence d'une relation sincère centrée sur l'individu. A vous de jouer.

 


 

¹http://www.orgasmsurvey.co.uk/

 

 

 

 

 


29/11/2014
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La cause ... c'est nous !

L’embouteillage comme l’archétype de l’absence de cause

L’automobiliste pris dans un embouteillage autoroutier fait montre d’un comportement tout à fait singulier. Le pied sur l'embrayage, il tente d'évaluer une réalité que ses décisions ont contribué à créer.

Où se trouve la cause de ce bouchon ?

L’autoroute de Normandie et en particulier l’axe qui part de l’Ouest Parisien jusqu’au tunnel de Saint-Cloud - ou inversement – est le théâtre régulier d’un trafic très perturbé. En complément de notre propos, nous pourrions tenter de comprendre comment cette autoroute, sensément construite pour garantir la fluidité du trafic et le débit maximal aux usagers, peut se figer chaque matin en un énorme parking [BAK, pp 257-264, 1999]. Partons de la migration journalière d’un banlieusard Ouest-Parisien empruntant l’A13 pour rejoindre chaque matin à 7h10, en cohorte disciplinée, le tunnel de St Cloud. Au sortir du Triangle de Rocquencourt la vitesse de cet automobiliste sera inéluctablement contrainte à la baisse par les nombreux véhicules en provenance de Versailles qui n’auront eu de cesse de venir s’agréger devant lui en une masse visqueuse aux soubresauts irréguliers. A partir de ce point, livré aux influences réciproques des véhicules qui l’entourent, la conduite de cet automobiliste sera prise dans le jeu d’oscillations incessantes ou les arrêts brutaux succèderont aux pâles reprises d’un flux autoroutier devenu irrémédiablement chaotique. Le comportement de cet automobiliste est désormais rigidement connecté aux actions de ses plus proches voisins. Si une voiture va trop vite, il devra ralentir afin d’éviter l’accident. Après avoir été ralenti par la voiture de devant, les véhicules accéléreront de nouveau pour reprendre leur course. La distance qu’un automobiliste prendra soin de laisser intentionnellement entre lui et le véhicule qu’il suit dépendra fortement de sa capacité de freinage et de son habilité largement éprouvée à réagir aux décélérations intempestives de ce flot de véhicules aux comportements décidément imprévisibles. D’autre part, en pareille circonstance, les automobilistes prêtent une égale attention aux véhicules qui les précèdent afin de déjouer la faute d’inattention du flot amont. Enfin, les automobilistes achèveront de réguler leur vitesse ainsi que leur distance aux autres véhicules en fonction du déroulé et de la nature parfois chahutée de la chaussée. Maintenant, si l’on attribue à cet « homo automobilicus » le comportement d’un être rationnel, dégagé des influences des autres, parfaitement autonome et uniquement préoccupé de maximiser son temps, on peut faire l’hypothèse que son obsession sera de conjuguer l’augmentation de sa vitesse avec la réduction de sa distance avec le véhicule qu’il suit. Un débit élevé de véhicules pourrait être ainsi maintenu à condition d’adapter, pour une gamme de vitesse donnée, l’écart entre les conducteurs. En principe, rien ne s’opposerait même à viser le débit maximal s’il était possible de faire rouler, à vitesse croissante, l’ensemble des véhicules pare-chocs contre pare-chocs. A condition d’adapter l’écart entre les véhicules - une vitesse plus faible devant être compensée par une réduction de l’écart et inversement - il n’existerait aucune difficulté pour obtenir sous le tunnel de Saint–Cloud ou sur n’importe quel autre point en amont, le débit optimal de véhicules évitant ainsi de transformer le moindre trajet en enfer. Selon ce schéma, la distance entre véhicule pourrait faire l’objet d’un contrôle rigoureux. En principe, notre « homo automobilicus » prouverait alors que par l’exercice d’un contrôle rigoureux et concerté des distances respectives, la congestion du trafic n’est pas inéluctable. En principe, oui, mais en principe seulement car cela impliquerait que la distance entre les véhicules puisse faire l’objet d’une concertation parfaite de la part de l’ensemble des protagonistes engagé dans le trafic. Or, ce n’est pas ce qui se passe et l’embouteillage, en figurant l’archétype des situations d’encombrement, ne fait que reproduire ce qui se passe dans toutes les files d’attente. Que ce soit dans la file d’attente du téléphérique du Mont d’Arboix à Megève, sur le quai de la ligne 13 de la station St Lazare, ou sur n’importe quelles parties autoroutières du périphérique parisien - ou chacun soucieux de sortir au plus vite de l’impasse se déprend de tout exercice de concertation et de coopération. Globalement, en de telles circonstances, l’autre est perçue comme un obstacle à sa mobilité. Aussi, chacun restant persuadé du bien fondé de sa situation particulière, cherche a contrario à s’affirmer aux dépens des autres dans la manifestations répétées de tentatives parfois désespérées de changement de file, d’accélérations vaines, de débordements et de décélérations rageuses autant qu’inutiles, qui ne font qu’accroître les oscillations d’arrêts et de reprises. En outre, selon une loi inexorable, l’accroissement de l’écart entre les véhicules faisant plus que compenser l’augmentation de la vitesse des véhicules, on en vient toujours à constater que le débit diminue lorsque la vitesse augmente [DUPU(a), p 157, 1982]. Relation éminemment contradictoire s’il en est.

Dans cet exercice, l’automobiliste se donne l’illusion d’être indépendant, autonome et libre de développer les stratégies individuelles qui vont lui assurer le plus grand succès pour gagner sur les autres le bénéfice de quelques minutes. Cependant prétendument libre et autosuffisant, l’automobiliste se trompe. Il ne se doute pas que sa conduite est asservie à celle des autres. Il est de fait pris dans l’implacable processus de totalisation que chacun contribue - malgré lui - à alimenter par un comportement qui au final se révèle n’être que la réplique exacerbée aux comportements de l’autre. La cause du bouchon que des millions de banlieusards, chaque jour, s’évertuent excédés à situer au loin dans un hypothétique accident, dans une cause qui se doit d’être externe, n’existe finalement pas en soi dans la plus grande majorité des cas. Pour reprendre Schopenhauer, combien avons-nous été ou plus sûrement, combien sommes nous encore à nous « émerveiller d’un miracle dont on est en premier l’auteur »[1]. Cette interrogation, sur laquelle nous reviendrons abondamment, revient à poser la question de l’attribution d’un sens. Il n’existe donc pas, la plus part du temps, de causes externes particulières et même, si ces ralentissements peuvent être attribués à des causes, ces dernières n’expliquent rien de pertinents. Ces causes sont à ranger dans l’arsenal des millions d’autres causes possibles qui auraient pu, avec la même ampleur, présider au gel du trafic. La seule cause, c’est la totalisation non voulue et implacable qui conduit chacun à se comporter en étant asservie aux comportements des autres. Répliques ou comportements mimétiques d’autant plus contradictoires qu’ils résultent justement d’une volonté pour l’automobiliste de rechercher à se distinguer du comportement de l’autre. A lever l’obstacle que constitue l’autre, à chercher à s’en écarter, il ne fait que le convoquer. La circulation automobile, en pareille circonstance, présente toutes les caractéristiques de la guerre de tous contre tous. Car chacun, pris dans l’illusion de liberté et de maîtrise de sa conduite, marquant pour le comportement de « l’Autre » l’apparence feinte de sa plus parfaite indifférence, ne cesse paradoxalement de créer l’obstacle à sa propre conduite.



[1] Paul Watzlawick, Les cheveux du baron de Münchhausen, Psychothérapie et « réalité », p 177, Essai, Seuil, 1991.

[2] S.Freud, Psychologie des foules et Analyse du moi, op. cit. pp 129-229 in Essai de Psychanalyse, Pbp.

[3] F.Hayek, Droit, Législation et liberté, cité par Jean Pierre Dupuy, Introduction au sciences Sociales, Logique des phénomènes Collectifs, Ellipses, 1992, p 215.


30/11/2014
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SFR

L’arbitraire

 

Lorsque les anticipations des uns répondent aux attentes des autres produisant un résultat mutuellement profitable, le cercle des anticipations croisées cesse pour former un équilibre des échanges. Cet équilibre, polarisant sur lui l'action de tous, forme une solution à un problème de coordination. Or, ces règles d'action sont systématiquement en concurrence avec d'autres façons de se coordonner. Une régularité est retenue mais les interactions sociales auraient pu conduire à une solution très différente pour un problème de coordination pourtant identique. On reconnait bien là les traits distinctifs de la convention qui forme une solution arbitraire à un problème de coordination.

A la limite peu importe la façon dont les gens se rapportent les uns aux autres, puisque encore une fois, la seule chose importante est que les gens retiennent des règles qui assurent le succès de leurs échanges. Or, ce point soulève néanmoins une question d'une toute autre nature. Car, s'ils existent plusieurs équilibres, cela suppose l'existence d'une alternative, donc la possibilité pour les acteurs de choisir. En toute logique, si la situation n’offrait aucune alternative sur la façon de se rapporter les uns aux autres, il n'y aurait pas de problèmes de coordination, pas besoin de règles communes d'action et évidemment pas de risque de faire le mauvais choix. 

 

Enjeux et jeux de coordination

 

Dans un passé récent, j’ai été confronté, comme de nombreux banlieusards, à la très mauvaise qualité du réseau SFR mobile. Afin d’échapper aux arrêts intempestifs des appels téléphoniques et, plus accessoirement, pour ne plus avoir à errer ridicule en pyjama dans les allées de notre résidence à la recherche d’un réseau systématiquement déficient, j’ai préféré un concurrent de ce réseau. Maintenant, en pareille circonstance, la question a toujours été de savoir à qui revenait l’initiative de rappeler son interlocuteur. Dans la plus grande majorité des cas, l’initiative revient simplement à celui qui a été à l’origine de l’appel. Dans ce cas, l’équilibre de l'échange s'établit sur la base d’une règle simple qui consiste pour chacun à adopter un comportement différent et complémentaire ; le premier rappelle et le destinataire attend d’être rappelé. Maintenant, SFR rebat souvent cet équilibre bien entendu des échanges. Car, si à la première coupure, la stratégie est appliquée et marche, rien ne précise la conduite à tenir à la 2nd, 3ème ou même 4ème interruption. Différentes façons de régler sa conduite viennent alors à l’esprit et je défis quiconque de ne pas y avoir songé sur l’instant. A la seconde coupure, si l’initiative revient toujours à celui qui était à l'origine de l'appel, le destinataire de l’appel pourrait se sentir obligé de prendre la main. A la troisième coupure, les anticipations de chacun auront peu de chances de se révéler appropriées et les échecs de coordination seront fréquents. L’initiative pourrait en effet tout à fait revenir à celui dont la phrase était destinée et non pas à celui dont la phrase a été coupée. Une relation hiérarchique pourra influencer le subordonné à reprendre l’appel privant le supérieur de cette initiative. L’initiative pourrait revenir à celui qui était alors en demande ou inversement, à celui qui était en offre, à l’homme plutôt qu’à la femme. La différence d’âge pourrait-elle intervertir pour régler cet échange ? Le plus jeune se sentirait-il obligé de rappeler et le plus âgé de patienter ? Les alternatives sont légions et leur combinaison immense. Or, pour une large part, nos anticipations concorderont car l’initiative sera généralement prise et répétée par celui qui a été à l’origine de l’appel. Maintenant, ce dernier aura également pris soin de prévenir de vive voix, qu’à la 3ème interruption, il sera plus sage de se rappeler … de nos fixes respectifs. 

 

 

 

 


09/12/2014
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